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On a marché sur la ligne et autres jeux

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Par Danielle Ross

Je cherchais un titre pour parler des jeux de notre enfance. Ma sœur Diane m’a dit, appelle cela : on a marché sur la ligne. La ligne. La voie ferrée. C’était un de nos terrains de jeux.

C’était avant la route 132.

Nous passions chez Pierre-Paul et nous allions sur le chemin de fer, regarder passer le petit pomper, draisine de son vrai nom, avec à bord des papas du village qui travaillaient sur la ligne. Quand le train arrivait, celui qui arrivait de Mont-Joli, nous saluions le chauffeur qui nous lançait un paquet de gomme Spirmint ou Juicy Fruit. Souvent, nous marchions vers Matane ou Baie-des-Sables en nous faisant croire que nous étions des aventuriers… Puis nous nous fatiguions et on s’asseyait alors dans le fossé pour manger des mûres sauvages. Combien de pièces d’un sou et de cinq cents ont été aplaties sur les rails quand le train passait ?

Car nous laisser jouer dehors, c’était primordial et nos mères, prises par le ménage, le lavage, la cuisine, nous poussaient vers l’extérieur.

En plus de la ligne, il y avait le quai. Terrain de jeu magnifique. Les vagues qui se fracassaient au bout du quai, le St-Ulric amarré, le parfum du salin, les gars qui descendaient dans les échelles jusqu’à toucher la mer. Ma première canne à pêche a été achetée par mon beau-frère Guy chez Alphonse Fournier. Ma sœur Diane me dit que nous disions des « parches ». Bien sûr, je l’ai échappée ma parche, la même journée au bout du quai. Pendant des jours j’ai arpenté la grève pour la retrouver dans le sable. En vain.

Les flots du village pêchaient le « crapote » qui mouraient sur le quai, abandonnés. Et souvent après avoir trop fumé. Plusieurs comprendront.

Nous jouions à la cachette derrière les maisons. Nous avions des codes de sifflements. Et chaque membre des gangs reconnaissait le sien. Notre terrain de jeu était presque sans limites. Mais nous restions entre le pont de la rivière et l’église, je ne sais pas pourquoi. Aucune inquiétude pour les mamans. Les grands prenaient soin des petits. Bien sûr, les plus vieux n’aimaient pas cela, mais les mères l’avaient dit. Prenez-en soin ; c’était la règle et les plus grands la suivaient.

Donc, dans le village, nous nous cachions. Derrière les maisons, les cordes de bois. On passait par les petites rues sous l’œil de Nigger, le chien de Lucien Talbot. Nous changions de jeu souvent. Les filles sautaient à la corde. Les gars jouaient au ballon. Un jeune, mieux nanti, avait eu en cadeau un gant de baseball, donc c’était lui, bien sûr, qui était le chef. Un jour la balle était arrivée dans la cour de monsieur Raoul. Il n’endurait pas les enfants. C’est parce qu’il n’en a pas disait maman, bienveillante. Donc il avait confisqué la balle bleu-blanc-rouge. Il avait fallu que maman aille la récupérer.

Ici, il faut boucher les oreilles des petits. Nous jouions aussi à la BITE… Ouvrez maintenant leurs oreilles. C’était mon jeu préféré : deux briques, un petit bout de bois placé sur les briques ou sur deux petites bûches et avec une grande tige de bois, on envoyait le petit bout de bois voler le plus loin possible. Il y avait le lanceur ou la lanceuse et ceux ou celles qui attrapaient. Tout cela souvent dans la rue du Capitaine, avec les p’tits Gagnon et les p’tits Bernier.

L’été, tout le petit gang montait à la rivière à Pierre-Paul, la Rivière-Blanche. À quelques kilomètres de nos maisons. Mon frère souvent me portait sur ses épaules. Yvon D. et moi nous étions les plus petits. Nos frères et sœurs nous trainaient. C’est ce qu’ils disaient avec un grand soupir. Aaah !

Puis il nous fallait bien rentrer pour le souper. En écoutant Bobino et la Boite à Surprise. Et nous repartions dehors. Souvent jouer au Ciel… la marelle. Une vieille statue de la Vierge Marie cassée nous servait pour tracer les carreaux.

Juste avant sept heures, nous attendions les mères appeler les enfants. C’était l’heure du chapelet. Nous rentrions dans nos maisons à contrecœur. Ma mère aussi n’aimait pas cela. Et la voix de Monseigneur Léger était si endormante. Mais ce n’était pas lui qui allait venir plier le linge. Il avait des domestiques pour le faire. Maman souvent se mettait en retrait derrière nous. Cette voix qui sortait de la radio. Elle n’aimait vraiment pas cela, s’agenouiller devant cette religion, qui rendait les femmes si soumises.

Quand la soirée se terminait, maman nous lavait sur le bord du « sign ». Pas encore de bain. Elle nous couchait en nous racontant une histoire. Puis nous nous endormions au chant de la machine à coudre. Parfois, je me demande quand ma mère et toutes les mères du village dormaient. Les pères, pour la plupart, étaient au chantier.

Souvent les soirs d’été, les chiens du village se mettaient à japper à l’unisson. Maman disait : c’est le père Ti… qui s’en vient. Cet homme n’aimait pas les chiens et les chiens le lui rendaient bien. Mais cela, c’est une autre histoire.

 

 

 

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