par Valérie Blanchet
Comment vivez-vous le confinement? La distanciation sociale? Quelle est votre réalité de vie en ce moment? Pour ma part, au début, j’ai vécu ça comme une mini-vacance, un ralentissement du rythme de vie que nous menons.
Si cela résonnait comme une délivrance au départ, j’ai rapidement constaté que je tournais en rond : les obligations extérieures qui rythment mon quotidien en temps normal ne structuraient plus mes journées de la même façon. Une sensation de limitation aussi s’est fait ressentir parce que l’on reste presque exclusivement à la maison et que l’on ne peut plus aller visiter les amis, la famille.
Les sorties sont soigneusement planifiées et limitées à une sortie par semaine pour faire le tour des épiceries. Après une dizaine de jours de ce régime, j’ai commencé à me demander combien de temps cette crise allait durer, à appréhender combien de mois elle allait moduler nos vies et j’ai commencé à paniquer et à angoisser.
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Cela a peut-être à voir avec le fait que les valeurs qui régissent notre mode de vie nord-américain sont principalement orientées sur le FAIRE et l’AVOIR et très peu sur L’ÊTRE. « Être suffit. » C’est une phrase que j’ai lue un jour à l’endos d’un ouvrage. Mais qu’est-ce que ça veut dire? Comment nourrissons-nous cela au quotidien quand l’objectif de nos existences est souvent de travailler, faire, pour posséder, avoir. Le travail est nécessaire, mais nourrit-il notre être profond? Et quand le travail s’arrête, on fait quoi? On devient quoi? Que reste-t-il?
Si vous vivez de l’anxiété, arrêtez-vous pendant un moment, fermez vos yeux, prenez conscience du simple fait que vous êtes là, dans cette seconde qui passe, vous n’avez pas à penser à rien d’autre. Inspirez l’air par votre nez; concentrez-vous sur le trajet que l’air prend pour se rendre à vos poumons; il descend ensuite et vous permet de gonfler votre ventre à pleine capacité.
Puis expirez; suivez mentalement le trajet inverse de l’air, poussé par votre ventre qui se dégonfle. Sortez l’air par votre bouche laissez sortir avec lui toutes les choses qui vous inquiètent.
Pendant que vous vous concentrez sur le mouvement de votre respiration, vous existez. Il n’y a rien d’autre que votre corps, cette merveilleuse machine qui vous maintient en vie et votre conscience et cela suffit. Tout le reste a une importance relative pendant cet instant précis.
Le jeune enfant a cette capacité naturelle à se tenir spontanément dans la pleine conscience de son être, il est là tout simplement, il vit pleinement dans le moment présent, il absorbe tout du monde qui l’entoure. À partir de 3-4 ans déjà, l’enfant devra composer avec des petits passages à vide où l’ennui l’envahira momentanément.
C’est normal et important de le laisser négocier avec ces moments de vide parce que c’est à partir de ceux-ci que des idées surgissent et que sa créativité naît. Si pour tromper son ennui, on lui laisse une tablette ou un téléphone intelligent entre les mains, il développera une grande dépendance à ces stimulations et acceptera plus difficilement de surmonter ce vide pour aller à la rencontre de sa créativité.
Comme adulte nous n’échappons pas à ce piège non plus, c’est pourquoi éteindre la télévision, mettre les médias sociaux de côté pendant une période de temps (ou mieux définir une période pour l’utilisation de ceux-ci, ou encore se limiter à les prendre pour des utilisations précises) est un premier pas pour rétablir le contact avec son être profond. Les photos de ses amis sur Facebook, la nouvelle de dernière heure sur la pandémie qui risque de nous replonger dans la peur peuvent bien attendre un peu.
Depuis une semaine environ, il y a quelque chose qui a changé en moi, j’ai commencé à vivre la distanciation sociale autrement, à voir surgir des instants de grâce à travers mon quotidien, à me donner la permission d’utiliser ce temps que j’avais à ma disposition pour travailler sur moi, pour questionner des éléments dans ma vie qui ne me servent pas, à introduire dans mon programme de courtes activités qui me stimulent et m’aident à me sentir mieux dans ma peau (comme cet entraînement de 20 minutes sur internet qui comble mon besoin de bouger, réduit mon stress et m’aide à me sentir plus combattive dans les tâches qui m’incombent).
Peu importe sa situation de vie et particulièrement en ces temps mouvementés, on est amené par la force des choses à réfléchir à ce qui compose son quotidien, à essayer de trouver des solutions pour réduire son stress, les tensions et les irritants qui surgissent inévitablement. Prendre cette pause une ou deux fois par jour, se poser pendant un moment, prendre conscience de soi, écouter ce qui se passe au plus profond de son être permet ensuite de faire des choix plus éclairés, mieux alignés avec ses besoins véritables.
Merci pour cette belle réflexion !